Récit d'une ultra stressée...
Le soleil inonde ma chambre de ses chauds rayons et le chant mélodieux des oiseaux me sort doucement de mon sommeil : je m'apprête à vivre le plus beau jour de ma vie. Il y a tout juste un an, l'élu de mon cœur s'est décidé à me demander ma main, cédant ainsi à de longs mois de harcèlement quotidien. Après un an intensif de préparatifs - et de nombreuses prises de bec avec l'apollon qui partage ma vie - pour organiser mon conte de fille, le jour J est enfin arrivé : je vais me marier!
Le planning est serré, je n'ai pas une minute à perdre. Pourtant d'ordinaire si peu matinale, c'est avec un enthousiasme effarant que je saute hors du lit, avale un guronsan avec un café bien fort et débute ma journée marathon! Je me rends tout d'abord dans le salon de coiffure où des doigts de fée doivent dompter ma tignasse crépue et tenter de me sculpter un chignon digne de ceux que portent fièrement les princesses coincées dans les pages du magazine Point de vue. Pendant qu'une jeune femme me plante ses griffes dans le crâne pour me faire un massage censé me relaxer, une autre s'occupe de me dessiner des ongles parfaits. Une fois mes cheveux lissés et mon chignon bien épinglé, je suis prête à me faire maquiller.
Je suis dans les temps, mais presse quand même le pas pour rejoindre mon appartement où m'attendent mes témoins. Le ciel bleu et lumineux de ce matin n'est plus qu'un lointain souvenir et c'est en un temps record qu'une pluie diluvienne s'abat sur la ville. Malgré un effort surhumain pour tenter de me faufiler entre les gouttes, je rentre trempée jusqu'aux os et relookée avec une coupe gonflée par l'humidité et un maquillage affreux qui me coule jusque dans le cou, me transformant ainsi en parfait sosie du chanteur trash Marilyn Manson. Une catastrophe en entraînant une autre, dans la précipitation j'ai négligé mes mains et les fines lignes blanches de ma french manucure ressemblent désormais plus à de malheureuses bavures de Typex... Ô rage, Ô désespoir...
Deux solutions: me jeter par la fenêtre, et ne risquer que de vulgaires hématomes puisque je ne suis qu'au premier étage ou relativiser... C'est le moment où jamais de me remémorer mes cours de yoga : je prends une grande inspiration dans l'espoir de libérer mes chakras, sous peine de crise de nerfs immédiate! Je suis bien décidée à ce que rien ne vienne gâcher ma journée.
Lorsque je me présente devant mes témoins, celles-ci ont la décence de ne pas s'esclaffer à la vue du spectacle comique que je leur offre. Là au moins j'en suis convaincue, ce sont de vraies amies. Toutes deux m'invitent alors, d'un ton rassurant, à commencer à m'habiller. Quand j’aperçois cette affreuse robe, je comprends immédiatement que la vendeuse s'est trompée de modèle lors de la livraison... Sous le choc je perds connaissance et m'écrase au sol avec fracas. C'est sous les gifles douloureuses de celles que je considérais encore jusque-là comme mes amies, que je retrouve mes esprits. Aux vues des délais je n'ai d'autre choix que d'enfiler cette robe pourtant si différente de celle dont j'avais rêvée. Positivons: ce déguisement de meringue me permettra peut-être de postuler comme mascotte lors du prochain Salon nationale de la boulangerie pâtisserie...
Plutôt que de me laisser submerger par cette dépression chronique qui me guette depuis le début de la journée, je rejoins l'église dans laquelle familles et amis sont d'ores et déjà tous réunis. Alors que je m'apprête à entrer, au bras de mon père, sur les notes de la Suite n°3 en D Majeur de Bach, sous les yeux larmoyants de mes proches, un son strident résonne au coeur de la nef... C'est une malédiction!
Je jette alors un coup d'oeil autour de moi et aperçois ce "compagnon" qui comme chaque matin, depuis de nombreuses années, me rappelle que la journée appartient à ceux qui se lèvent tôt. La sonnerie entêtante et répétitive de mon réveil me sort de cet abominable cauchemar qui a mouvementé ma nuit et me rappelle qu'il me reste encore 319 jours pour organiser ce qui sera le plus beau jour de ma vie!